Peu après la nativité de
Jésus, un ange annonce l’orage et montre à Joseph la voie pour y
échapper : « Fuis en Égypte… car Hérode cherchera le petit enfant
pour le faire périr » (Mt 2,13). Hérode déploie son
pouvoir pour tuer Jésus ; Joseph doit assurer la survie de l’Auteur de la
Vie : appliquer l’ordre de l’ange, choisir l’itinéraire, éviter les routes
trop fréquentées, se cacher des curieux, pourvoir à la subsistance durant
l’exil. Un dur travail qui lui demande de mettre en jeu toute sa prière, toute
l’énergie de sa prudence.
Parmi les épisodes dramatiques de l’enfance du Christ,
la fuite précipitée en Égypte a attiré l’attention des fidèles ; des
anciennes traditions, reprises dans les évangiles apocryphes, ont rajouté des
détails à ce voyage, que les artistes ont illustré. Parfois on représente le
cheminement hâtif de la sainte Famille : Marie, montée sur un âne porte
l’enfant ; Joseph précède la marche ou la suit ; parfois un ange ou
d’autres personnages se joignent au groupe. Certains ont préféré la montrer sous
un jour paisible, en imaginant une pause dans un oasis, ou encore l’arrivée
triomphante en pays païen avec l’écroulement des temples idolâtres.
Le cheminement
dramatique des fuyards a été illustré par des détails significatifs : les
voyageurs attaquent une pente raide ; Joseph regarde en arrière dans la
crainte raisonnable de voir pointer les persécuteurs à l’horizon ; ou il
accélère le rythme pour gagner du terrain sur les soldats d’Hérode. C’est le
geste choisi à la Renaissance par le peintre vénitien Victor Carpaccio (vers
1500) ; son tableau, exposé à la National Gallery de Washington, montre,
dans un paysage verdoyant sous un ciel serein, les trois membres de Sainte
Famille, avec l’âne serviable. L’urgence
de Joseph contraste avec l’attitude paisible de Marie et son Fils : ils
peuvent se reposer dans la diligence du père. Joseph assure l’espérance.
Il a sauvé la vie de
Jésus. Le pape Léon XIII mettait en
parallèle le souci de Joseph pour préserver l’Église contre les attaques
assassines de l’Exterminateur : « De même que vous avez arraché autrefois l'Enfant Jésus au péril de la
mort, défendez aujourd'hui la Sainte Église de Dieu, des embûches de l'ennemi
et de toute adversité ».
Satan, « meurtrier
dès le commencement » (Jn 8, 44), n’épargne pas les
membres du Sauveur. Sur le plan individuel il incite au péché grave, qui
introduit la mort à la grâce ; sur
le plan collectif, il déploie les structures de péché et les persécutions pour
arracher le bon grain de la foi. Jean-Paul II, quelques semaines avant la chute
du mur de Berlin (1989), confiait au « Gardien du Rédempteur » la
tâche de préserver l’Église contemporaine « dans ses efforts redoublés de nouvelle évangélisation des pays
où la vie chrétienne était autrefois
florissante et qui sont maintenant mis à
dure épreuve (exh. Redemptoris
Custos §29).
Dans ce temps de
transition vers le nouveau pontificat, nous confions à Joseph les batailles de
la famille de Dieu sur terre.
Par l'abbé Fernandez.
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