Les clés de l’amour
L’Agneau
Vivant, devenu « le grand berger des brebis » (Hébreux 13,
20), rassemble son troupeau dispersé. Une traînée de lumière se répand de la
Madeleine à Cléopas et jusqu’à Pierre, Jacques et Thomas; après eux, plusieurs
centaines de disciples ont vu enfin Jésus ressuscité.
Le Sauveur
accomplit les dernières volontés du Père : un nouveau peuple est engendré
par la Parole évangélique ; une nouvelle alliance est scellée dans l’eau,
le sang et l’Esprit ; un nouveau ministère sacerdotal et un commandement
nouveau, selon la « démesure » de l’amour du Christ, façonnent
l’Église.
La Trinité
assure sa cohésion et la pourvoit d’une assise solide « pour que tous
soient un » (Jean 17, 21), comme le sont le Père et le
Fils dans l’Esprit. Puisque la Trinité aime l’Église, l’une des brebis portera
la houlette du seul Pasteur divin, en son nom.
Moïse avait
transmis son autorité à Josué (Deutéronome 34, 9) ; Élie, à
Élisée (2 Rois 2, 9). Au Thabor, Pierre n’est pas loin du
leader et du prophète : il vient d’être élu comme point d’appui de la foi
et de l’amour au service de ses frères.
Jésus
ressuscité « est apparu à Képhas » (1 Corinthiens 15,
5) avant les autres apôtres. Simon avait reçu ce surnom, hautement significatif
par ses liens : à la « Pierre d’Israël » (Isaïe 30,
29), le refuge sûr qu’est Dieu lui-même, source de toute sagesse et
puissance ; à la « pierre d’angle » (Id. 28,16)
qu’est le Messie pour la maisonnée de Dieu.
L’Époux a
pensé depuis longtemps à son Église, qui devra parcourir sur terre le long
chemin jusqu’aux noces éternelles. À Césarée il avait été question de foi sur
la vraie identité divine de Jésus ; à Génésareth, le dialogue du
Ressuscité avec Pierre tourne autour de l’amour et du martyre.
Après les
reniements, à Jérusalem, le regard du Sauveur avait déjà arraché de larmes de
componction au cœur lâche de Simon ; maintenant, une alliance d’amour est
nouée entre le Pasteur Souverain et son apôtre : « Pais mes
brebis » (Jean 21, 17). Ainsi, sans ambiguïté, « il
l’a institué pasteur de tout son troupeau » (Concile Vatican II,
const. dogm. Lumen Gentium §22).
Pierre-Paul
Rubens (1614) a mis soigneusement en image le Christ ressuscité confiant à
Pierre la primauté de juridiction et de magistère ; la clé symbolique
semble jaillir de la plaie de son Cœur.
Le ministère
de gouvernement de la nouvelle alliance sera présidé par la logique de la
charité : ce sera un « office d’amour » (saint
Augustin, Homélies sur l’évangile de Jean, 123), car « le
soin pastoral aux brebis du Christ fait partie de l’amour de Dieu »
(saint Thomas d’Aquin, Somme de Théologie II-II, q. 185 a. 2).
La charité
pastorale du Christ agit par le zèle des successeurs de saint Pierre : « un dévouement
total jusqu'à l'épuisement des forces et, si nécessaire, au sacrifice de la
vie » (Benoît XVI, discours, 1er juin
2006).
Pierre, comme Jésus l’a fait, devra se donner tout entier. « N’oublions jamais que le
vrai pouvoir est le service et que le Pape, lui aussi, pour exercer le pouvoir
doit entrer toujours plus dans ce service qui a son sommet lumineux sur la
Croix » (pape François, homélie, 19 mars 2013).
L’amour au
Christ porte à aimer chaque pape. Prier pour lui est un dû de piété
filiale. La prière
pour la loyauté de ses collaborateurs fait partie de ce soutien
avisé. Le souci de communion consolide l’Église.
Dans cette
année de la foi, nous demandons la grâce de comprendre mieux l’épaisseur du
ministère pétrinien. S’il donne solidité à chaque membre vivant de l’Église, il
réclame en retour reconnaissance et fidélité quotidiennes.
« Je te
donnerai les clefs du Royaume des Cieux » (Matthieu 16, 19).
Certes, les clés
ont été confiées à lui seul ;
mais nous sommes
là pour l’aider à ouvrir « la porte de la foi » .
Par l'abbé Fernandez.
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