lundi 23 décembre 2013

Magnificat au féminin


Marie, enceinte du Verbe fait chair, fait écho à la Parole. Devant Élisabeth, son cœur se dévoile dans un impromptu inspiré : « Désormais toutes les générations me diront bienheureuse » (Luc 1,48). Toutes, y compris les ancêtres les plus humbles. Le cantique virginal embrasse l’histoire de la miséricorde divine, dans une apothéose de gratitude.

Notre Dame admire ses prédécesseurs justes, mais elle peut encore penser à d’autres femmes qui, présentes dans la généalogie de Jésus (Matthieu 1,3-6), ont connu des souillures.

Au temps des patriarches, Tamar — la Cananéenne deux fois veuve — fut déçue, humiliée, délaissée : son beau-père, rétif à appliquer les coutumes légitimes, tergiversait pour lui donner un nouveau mari. Dans son amertume, la femme ourdit une ruse ignoble. Juda, l’héritier de la promesse, reconnut enfin : « elle a été plus juste que moi » (Genèse 38,26). Tamar prolongea la postérité messianique.

À la veille du troisième millénaire, Jean-Paul II dénonçait véhémentement les abus hédonistes contre les femmes : « Nous ne pouvons rester impassibles face à ce phénomène, ni nous y résigner. Il est temps de le condamner avec force, en suscitant des instruments législatifs appropriés de défense » (Jean-Paul II, Lettre aux Femmes §5). La défense des droits de la femme fait partie de l’évangélisation : « Doublement pauvres sont les femmes qui souffrent des situations d’exclusion, de maltraitance et de violence » (Pape François, La joie de l’Évangile §212).

Aux débuts de la conquête de la Terre promise, Rahab, la courtisane miséricordieuse, crut dans le « Dieu du ciel et de la terre » (Josué 2,11). Sa foi agissante restera un exemple pérenne (Jacques 2,25 ; Hébreux 11,31) ; épargnée de l’extermination, elle épousera un membre de la tribu aînée.

Six générations plus tard, dans la Transjordanie, vivait Rut, lointaine descendante de la parenté d’Abraham. Devenue veuve, elle s’attacha, dans un élan de loyauté, à sa belle-mère israélite et, par elle, au Dieu Vivant (Rut 1,16).

Dans la mouvance romantique des « Nazaréens », Jules Schnorr von Carolsfeld, dans sa période de Munich (1828), peignit l’humble glaneuse : choisie comme épouse par la générosité de Booz, dans la région de Bethléem, elle ignorait alors la gloire de David, son arrière petit-fils.

Au début de la monarchie israélite, Bethsabée, épouse d’un guerrier hittite, fut poussée à l’infidélité par la convoitise du roi ; ensuite elle partagea la pénitence de David et donna naissance à Salomon, qui la fit asseoir plus tard « dans un trône à sa droite » (1 Rois 2,19).

Des drôles d’aïeules. Dieu choisit parfois les gens les plus éloignés : païens, étrangers, pécheurs.  La miséricorde brille davantage au sein de la misère. Malgré les ombres, ces quatre femmes, honorées par l’Évangile, sont un monument à la grâce. L'Église « désire remercier la Très Sainte Trinité pour le "mystère de la femme" et pour toute femme, pour ce qui constitue la dimension éternelle de sa dignité féminine » (Jean-Paul II, Lettre La dignité de la femme, §31).

Des maillons faibles peuvent être insérés dans une chaîne d’or. « Dieu élève les humbles » (Luc 1,52). Même les grands pécheurs sont pardonnés s’ils aiment en vérité.

Marie, Mère pure de miséricorde, contemple l’histoire, où elle découvre la logique du salut : « le lien intime qui unit l'ordre de l'amour et l'Esprit Saint » (Jean-Paul II, Lettre La dignité de la femme §29).
 
Par l'abbé Fernandez.

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